Elvire Jouve : la batterie dans la peau.

Elvire Jouve
Elvire Jouve - Crédit Photo: François NUQ

Chez Scarlette, nous avons à coeur de mettre en avant l’Auvergne et les femmes qui portent haut les couleurs de notre belle région. Etant batteur (amateur), je ne pouvais pas ne pas inviter Elvire Jouve, cette excellentissime batteuse auvergnate à nous parler d’elle, de son parcours et de musique. 

Bonne lecture! 

Scarlette Magazine : Hello Elvire, je suis super content de t’accueillir pour cette interview. Est-ce que tu peux te présenter ? 

Elvire Jouve : Bonjour Scarlette. Je m’appelle Elvire, j’ai 32 ans. Je suis originaire du Puy-de-Dôme. Je suis musicienne professionnelle et batteuse plus précisément. 

Scarlette Magazine : A quel âge as-tu commencé la musique, la batterie? Et pourquoi cet instrument? 
Elvire : J’ai eu envie de faire de la batterie très jeune; vers l’âge de 3-4 ans. Je viens d’une famille de musiciens et j’ai baigné dans la musique dès mon plus jeune âge. L’envie de jouer de la musique est venue presque instinctivement. 
A l’âge de 5 ans, mes parents m’ont inscrite à l’école de musique de Cournon-d’Auvergne. J’y ai pris des cours de tambour avec Christophe MERZET jusqu’à 10 ans. Ces 5 années de tambour m’ont vraiment apporté beaucoup techniquement.
Puis à partir de 10 ans, j’ai commencé l’apprentissage de la batterie. 

Tu me demandais pourquoi la batterie. Je n’ai pas vraiment d’explication rationnelle (rires). Visuellement l’instrument m’attirait. Et aussi, quand j’écoutais de la musique, c’était la batterie qui ressortait le plus. 
Mon frère avait un groupe de hard-rock qui répétait dans le garage à la maison, et tout ce que j’entendais, c’était la batterie; j’étais fascinée. 

Elvire Jouve - Crédit Photo JH Bertrand

Scarlette Magazine : Est-ce que tu joues d’un autre instrument? 

Elvire : J’ai appris les percussions classiques également et je joue du vibraphone, des percussions à claviers. A côte, je tatonne en piano, pour moi, pour composer. Mais je ne suis absolument pas pianiste! (rires). 

Scarlette Magazine : Quel est ton parcours musical? 

Elvire Jouve : J’ai commencé mon apprentissage avec Christophe Merzet et Bruno Rousset à Cournon d’Auvergne. Vers l’âge de 18 ans, je suis partie à l’école de musique de Cébazat pour bosser le jazz avec Philippe Mérien. 
Mais la batterie je m’y suis mise sérieusement quand je suis sortie du lycée. 
Après mon apprentissage en Auvergne, j’ai continué à l’école Agostini de Villeurbanne, l’Ecole Nationale de Musique, de Dans et Art toujours à Villeurbanne où je suivais les cursus jazz et musiques cubaines en parallèle.
Et j’ai terminé ma formation au Centre des Musiques Didier Lockwood à Dammarie-les-Lys à côté de Paris. 
Je me rends compte que je suis « Madame Ecoles » mais mon parcours m’a vraiment donné des bases hyper solides. 

Scarlette Magazine : Quelles sont tes influences en terme de musique?  

Elvire Jouve : j’ai découvert le jazz vers l’âge de 10-11 ans grâce à mon papa. Et je peux dire que le jazz ce sont mes premières amours. J’en écoutais tout le temps, je chantais les solos en boucle. Ca explique pourquoi je me suis orientée vers le jazz à un moment donné de ma formation. Ceci étant, j’écoutais aussi des choses de mon âge. Et puis venant d’une famille de musiciens, on écoutait de tout à la maison, jazz, rock, variété, métal. D’ailleurs le rock est aussi un genre qui m’est cher et que je joue beaucoup. Au même titre que le jazz, je ne peux pas m’en passer. 

Scarlette Magazine: Quels artistes te parlent plus particulièrement?

Elvire Jouve: J’écoute beaucoup de styles très différents ce qui fait que je n’ai pas réellement de batteur/batteuse de référence. J’ai jamais été réellement fan d’un ou d’une musicienne en particulier. L’admiration d’une seule personne est un concept qui me dépasse. Par contre je suis plus fan des groupes, du style, de l’esthétique, du son. En définitive, je m’inspire de tous les groupes, je me nourris du jeu de chaque batteur, batteuse que j’écoute. 
Mais si je devais te donner le nom de musiciens/musiciennes qui m’influencent actuellement, je citerais le batteur de jazz Eric Harland, Nate Wood (ndlr: multi-instrumentiste américain). Et puis j’aime vraiment beaucoup Anne Paceo qui est une batteuse française. Sa personnalité, ce qu’elle dégage et la musique qu’elle compose me touchent tout particulièrement. Ses disques sont très beaux. 

Scarlette Magazine: Aujourd’hui, la médiatisation des batteuses est nettement plus forte que par le passé. Il y a en France de très bonnes musiciennes (Anne Paceo que tu viens de citer, Amy Prajoux, Camille Bigeault la batteuse de Jennifer, toi). Comment ça se passe quand on est  une batteuse dans un milieu qui est quand même majoritairement masculin? 

Elvire Jouve: En fait, j’ai l’habitude d’être entourée de gars. Dans Sama Sam Kapa mon premier groupe (à l’âge de 14 ans), j’étais la seule « nana » et d’une manière générale, je suis plus à l’aise avec les mecs. Je suis pas à fond « groupe de filles » au prétexte que ça serait « plus vendeur ». La musique c’est avant tout une aventure humaine et il faut que ça « clique » entre les musiciens tout simplement. 
Le fait d’être une nana ne m’a jamais posé de problèmes dans les groupes avec qui j’ai joués. Par contre, c’était très différent dans les jams sessions. Je sens qu’il y a un petit a priori, que je vais devoir faire mes preuves.  
Je reçois aussi pas mal de sollicitations pour jouer dans des formations parce que je suis une fille, parce que ça serait cool d’avoir une nana à la batterie. Et la démarche n’est pas sincère. Si on me propose des collaborations, de jouer avec des musiciens, j’ai envie que ce soit pour mon jeu, pas parce que je suis une nana. La musique c’est avant tout une histoire humaine. 

Scarlette Magazine: Tu te définirais comme quel type de batteuse? Une musicienne de jazz qui joue du rock ou une rockeuse qui joue aussi du jazz? 
Elvire Jouve: Je suis ni l’une ni l’autre. En fait jazz et rock s’enrichissent. Avec mes groupes de jazz, je peux proposer des idées, une énergie plus rock’n’roll. Et c’est ça qui amènera ou pourra amener une couleur différente à la musique que l’on joue. 
Dans le rock, je vais proposer des choses un peu plus « fines » peut-être, qui vont permettre d’avoir un son propre. 
Même si les modes de jeu, les énergies sont très différents, je ne vois pas vraiment de frontière entre jazz et rock. Je suis batteuse avant tout. 

Elvire Jouve - Crédit Photo Liva RAKOTOARISON

Scarlette Magazine: Tu as déjà une longue carrière de musicienne derrière toi. 
Quels sont les groupes dans lesquels tu as joué et tu joues aujourd’hui? 

Elvire Jouve: Mon premier groupe s’appelait Sama Sam Kapa; j’avais 14 ans. C’était vraiment cool, le premier groupe on s’en souvient toujours. 
Aujourd’hui j’ai plusieurs projets Jazz ou Rock. 
En jazz, je joue dans Six-Ring Circus, un groupe de jazz hybride, très électrique avec Célia Forestier au chant, Elie Dufour aux claviers, Baptiste Ferrandis à la guitare et Vincent Girard à la basse. On s’est tous rencontrés à l’ENM et le groupe s’est formé en 2014. On sort notre second album très bientôt, le 24 septembre. 

Je joue aussi dans Iray, un trio jazz acoustique avec Liva Rakotoarison au piano et Vincent Girard à la contrebasse. On s’est également connus à l’ENM et on joue des compositions originales. 
Enfin, je joue dans le Nathan Mollet trio, un trio jazz du jeune pianiste Nathan Mollet originaire de l’Allier. Il a 17 ans, c’est un petit génie du piano et on vient d’enregistrer son premier album. (des compositions originales là encore). 

Pour ce qui concerne le Rock, je joue dans
– Ogino depuis une dizaine d’années maintenant. C’est un groupe de math-rock instrumental avec Kévin Robert à la guitare et Matthieu Halberstadt à la basse et la contrebasse. On compose le troisième album et on va reprendre les tournées. 
– La Milca, un groupe de rock français, basé à Moulins avec Jérôme Bernard à la guitare et au chant, Domi Emorine à l’accordéon et David Guilhem à la basse. 
– Lux Bas-Fonds, un groupe rock français de Blot-l’église composé de Géraud Bastar à la guitare et au chant, Fred Lézard à la guitare et Pat Le Black à la basse. 
– J’accompagne Evelyne Gallet une artiste lyonnaise dans une formation composée de Evelyne au chant, Clément Soto à la guitare et claviers et Greg Julliard au tuba. 

Comme tu le vois, je suis très très occupée. 

Scarlette Magazine: Avec la crise du Covid le monde du spectacle vivant a été complètement arrêté. Qu’est ce que tu as fait pendant ces 18 mois? 

Elvire Jouve: On a vécu plusieurs phases durant cette période. J’ai d’abord coupé un peu avec la musique qui m’occupait pleinement. J’ai pris du temps pour les autres, pour moi aussi, aller dans la nature. Ce break m’a fait du bien et m’a donné encore plus l’envie de faire de la musique au final. 
J’en ai aussi profité pour composer.  
Et puis avec les différentes formations avec lesquelles je collabore, on a composé, enregistré des choses, fais des clips. Bref, on s’est pas laissé abattre. 

Elvire Jouve

Scarlette Magazine: tu peux nous parler du collectif Choréactif et de Echo, le projet que tu viens de terminer très très récemment. 

Elvire Jouve: Pendant le premier confinement il y a eu un appel à projet mondial d’un centre de danse en Bourgogne. Les gens ont été appelés à danser chez eux et à se filmer, amateurs ou professionnels. Certains films ont été retenus et nous, on a choisi de prendre tous les films qui n’avaient pas été choisis; il y en a 125 au total! 
Le défi était de faire un court-métrage de 6 min maximum. J’ai travaillé avec la vidéaste Clotilde Amprimoz. Mon rôle était de jouer de la batterie en même temps que Clotilde faisait le montage, de construire un habillage sonore en direct avec la batterie en fait.  
Ca s’est fait sur plusieurs jours, sachant que le premier jour je n’ai pas joué; j’ai observé Clotilde travailler. 
Pour ce projet, je ne voulais pas être dans l’illustration même s’il y a une petite partie où je m’inspire des gestes des danseurs. Mais j’ai avant tout  essayé de produire quelque chose d’accessible, qui soit  dansant. Même s’il y a des ruptures, des choses incongrues ou décalées. J’ai du proposer des choses très nuancées aussi et c’est vraiment un travail très particulier et super enrichissant. 
C’est une première mouture, on vient de faire une sortie de résidence (semaine dernière) avec que que l’on a créé en 4 jours et il nous reste encore un peu de boulot. 
L’objectif est de proposer le film sous deux formats : 
– un premier format comme pour les festivals de courts-mérage avec diffusion du film. Je vais enregistrer les parties de batterie en studio. 
– on va proposer une formule ciné-concert où je jouerai en live. Il faut donc propposer un format plus long que les 6 min parce qu’un concert de 6 min c’est quand même relativement court (rires). On aimerait pouvoir présenter quelque chose qui dure au minimum 30 min. Et on réfléchit à rajouter des danseurs, peut -être un autre musicien….. 

Elvire Jouve - Crédit photo: FLORENZA BARIANI

Scarlette Magazine: Quelle est ton actu à venir?  

Elvire Jouve: J’ai été plus tôt pas mal sollicitée dernièrement pour participer à de nouveaux projets. Ils ne sont pas tous clairement définis donc je ne peux rien dire encore. 
Mais il y en a un dont je peux parler:  je vais participer à la création d’une pièce de théâtre ave des comédiens et deux autres musiciens. Nous allons composer la musique pour la pièce. Le projet va débuter à l’automne et on espère pouvoir jouer la pièce en 2022. 

Scarlette Magazine: Pour terminer, je te propose de jouer au questions/réponses.

Ton premier contact avec une batterie? 
Elvire Jouve: j’avais 3 ans, mes parents m’avaient offert une batterie jouet pour Noel.
A quel âge as-tu eu ta première batterie? 
A 10 ans, c’était une Linko rouge que j’ai reçue pour Noel. J’étais folle de joie (rires). 
Ton premier souvenir musical? 
Le groupe de mon frère, Augustin. Le voir jouer de la musique avec ses potes a été un élément déclencheur. 
Ton premier groupe ?
C’etait Sama Sam Kapa, un groupe de « ska-lunatic », du ska qui partait dans tous les sens. 
Ton premier succès? 
Je n’ai pas réellement de succès qui me vient à l’esprit. Chaque étape de ma vie de musicienne, constitue une réussite. Mon premier statut d’intermittente, le diplôme d’Ago ou du CMDL sont des moments importants de ma carrière dont je suis fière.
Le concert en tant que batteuse qui t’a marquée le plus ?
C’est un concert avec Iray il y a deux ans pour Jazz en tête et il a une saveur particulière. Quand j’étais petite, mon père m’emmenait à Jazz en tête ; je voyais tous ces musiciens sur la grande scène. Et 20 ans plus tard, c’était moi qui jouait sur la grande scène ! Emotionnellement, c’était très fort.
Avec quelle personne aimerais-tu travailler ?
Mon rêve serait de jouer avec Mike Paton, chanteur de Faith no more, Mister Bangle, Tomahawk.
Mais en tant que musicienne, j’aimerais jouer avec tout le monde, quel que soit le style musical.
Tu peux nous donner 3 titres que tu écoutes régulièrement ou qui tourne en boucle chez toi ?
Nemesys de Aaron Parks 
A Night in Tunisia de Dizzie Gillespie 
Ladies de la chanteuse Fiona Apple. Un titre parfait pour illustrer cet article!

Pour suivre l’actualité d’Elvire, c’est par ici : http://www.elvire-jouve.fr
Vous y trouverez toutes les infos sur ses dates, les groupes dont nous avons parlé dans l’interview. 

Elvire joue les batteries Tama et les cymbales Murat Diril. 

Elvire Jouve - Crédit photo: Crédit Yann CABELLO

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